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News & Events Venezuela, Comprendre la Crise: Bilan des expropriations
Venezuela, Comprendre la Crise: Bilan des expropriations
Venezuela, Comprendre la Crise: Bilan des expropriations
Expropriations au Vénézuela
Expropriations au Vénézuela

Date: 08 mars 2016

Source: Médiapart

Par Socializ 

Blog: Le blog de Socializ

Dès 2002, tout change, les expropriations forcées commencent. Au total, plus de 1168 compagnies seront expropriées dans différents secteurs estimé "clés" pour l’indépendance du pays en matière pétrolière, alimentaire et matériaux. Le but assumé était justement de devenir auto-suffisants et de pouvoir résister à toute attaque externe du Capitalisme International

Le Venezuela traverse actuellement une situation critique, coupures et rationnement électrique, pénuries alimentaires, manque de médicaments et de moyens matériels, le pays s’enfonce de plus en plus dans un gouffre qui semble sans fin. Déjà le plus dangereux du monde en terme de meurtres/capita, le Venezuela est également secoué par des mouvements sociaux qui éclatent un peu partout dans le pays et sont peu relayés par la presse grâce à l’hégémonie du gouvernement sur les médias (Reporters Sans Frontière classe le Venezuela 137e/178 dans son classement mondial de la liberté de presse).  Les gens protestent du manque d’eau, du manque d’aliments, du manque de médicaments… Les étudiants du centre du pays, plus touché que la capitale par  les pénuries, sont de nouveau descendus dans la rue ces derniers jours pour affronter la Garde Nationale et demander la démission du président Nicolas Maduro.

Entre temps, le gouvernement a entrepris certaines réformes comme l’augmentation des prix de l’essence mais ces mesures sont trop tardives et insuffisantes pour endiguer le cercle vicieux dans lequel est engagé le système productif national.

La ligne médiatique du gouvernement n’a quant à elle pas changé, les coupables sont partout sauf au sein de « La Revolucion », la droite, l’oligarchie, l’Empire, le FMI, la mondialisation, la Colombie,  une coalition internationale, le Peuple même (car il consomme trop) sont tour à tour accusés de la crise alimentaire qui touche le pays.

Pourtant, dans un pays où une bonne partie de l’appareil productif et l’attribution des devises sont contrôlés par l’Etat, il est difficile d’imaginer un monde où les fautifs seraient autres que les membres dirigeants de cette « Révolution »…

 

 Historique des Expropriations

Dès 2002, la ligne politique change, les expropriations forcées commencent. Au total, plus de 1168 compagnies seront expropriées dans différents secteurs estimés "clés" pour l’indépendance du pays en matière pétrolière, alimentaire et matières premières. Le but assumé était justement de devenir auto-suffisants (souverains) et de pouvoir résister à toute attaque externe du Capitalisme International (je l’avais oublié dans la liste des fautifs).

En 2013, on estimait que 41% des entreprises occupées/expropriées appartenaient au secteur de construction, 24% au secteur agro-industriel, 19% au secteur pétrolier, 6% au secteur commercial, 3% alimentaire. Les 7% des expropriations restantes concernaient la pharmaceutique, les emballages et l'électricité.

Le plus gros des expropriations (80%) a été effectué après 2009, on dénote qu'en 2011, 499 entreprises du secteur industriel ont été expropriées.

Au niveau des terres agricoles, plus de 5 millions d'hectares (50 000 000 000 m²) ont été expropriées par la « Revolucion »

 

 Le Bilan des Expropriations

En 1998, avant l'arrivée de Chavez au pouvoir, le Venezuela importait 1 250 millions de dollars de denrées alimentaires, en 2014, 9,500 millions de dollars ont été dépensés en importations avec une augmentation de 760% d'imports d'aliments. En 2015, 95% du lait en poudre, 70% de la viande bovine, 70% du sucre et 60% de maïs blanc consommés ont été importés.

Également en 2015, le Centre d'Ingénieurs de l'Etat Zulia (Nord-Ouest) estimait que 95% des terres expropriées ne produisaient pas, donnant plusieurs exemples de propriétés (Hacienda Bolívar, Hacienda El Capitan) qui autrefois produisaient de la viande, du lait, des fruits, et qui de nos jours ne produisent rien du tout ou presque. La "Revolucion" est passée par là.

Il y a quelques jours,  les ministres de l'alimentation et de l'industrie de l'année dernière (oui car on en change très souvent au Venezuela, ce qui n’aide surement pas à résoudre nos problèmes) ont dû rendre des comptes à l'Assemblée Nationale à présent occupée par l'opposition, présentant des chiffres et un rapport sur l’état de la production Nationale.

Contredisant les déclarations de l’Exécutif qui depuis des années clame que la production augmente (et que l’illettrisme recule, que la pauvreté diminue, ou que le chômage est en dessous de 5%, choses totalement fausses et impossibles à vérifier car les ONG ont été expulsées du pays), ces chiffres rapportent que les entreprises expropriées et crées par le gouvernement travaillent à 50% de leur capacité tandis que les entreprises basiques (sidérurgie, fer, aluminium, ciment) opèrent à 20% de leur capacité en moyenne.

Les rapports signalent que la majorité des entreprises publiques ont enregistré des chutes de production principalement à cause de la diminution des devises données par le gouvernement qui leur permettent d’importer des matières premières et d’entretenir les installations.

 

Une Dérive Typique des Régimes Communistes

Car dans les médias européens, on ne cesse de rapporter que Nicolas Maduro est un président Socialiste, cependant, les partis appartenant à l’internationale socialiste sont dans l’opposition et non pas au gouvernement. Souvenons-nous qu’URSS signifie « Union des républiques socialistes soviétiques » et qu’il s’agissait d’un système communiste. La plupart des grandes figures de la Révolution se réclament d’ailleurs d’idéologie Marxiste, déclarant la guerre du prolétariat contre l’oligarchie. Leurs agissements parlent par eux-mêmes : expropriations en masse, création de collectivités agraires, création de milices révolutionnaires armées,  création de la « Commune », culte de la personnalité du Leader de la révolution: nous sommes bien loin du Socialisme Européen…

Hugo Chavez était quant à lui un populiste muni d'un discours nationaliste, combo magique (si l'on en croît l'histoire) pour mener au pouvoir en temps de crise (car il y avait effectivement une crise sociale au Venezuela lors de son arrivée au pouvoir), les pires despotes que nos démocraties aient connu.

Il suffit de voir les milliers d'affiches différentes à la gloire de celui que certains appellent "le commandant éternel" ou "Le grand Timonier"(histoire de faire un clin d'œil à Mao), ou bien les différents dictons que la junte au pouvoir invente pour galvaniser la population: "Tenemos Patria" (nous avons la Patrie), "Chavez vive, la Patria Sigue" (Chavez est vivant, la Patrie Continue), "Hugo Chavez, Corazon de mi Patria" (Hugo Chavez, Coeur de ma Patrie), "Chavez sembro en la Patria un legado de compromiso y pasion" (Chavez a semé dans la Patrie l'héritage du compromis et de la passion).

"Ce sont les méthodes aveugles, hasardeuses et violentes avec lesquelles on appliqua la politique de collectivisation qui en furent responsables" - Trotsky au sujet de la chute massive de production suite à la collectivisation des terres en URSS -

Il semblerait que l'histoire s'est encore une fois répétée, dans son idéal Marxiste et sa paranoïa (sans aucun doute justifiée et recherchée de par les alliances internationales douteuses du Venezuela) d'interventions de "l'Impérialisme Américain", Chavez a commisles mêmes erreurs que la plupart des dirigeants ayant tenté d’appliquer l’alternative Marxiste:

Nomination à des hauts postes en fonction de l'inclinaison politique et du militantisme et non pas en fonction des connaissances ou du mérite.
Suppression des garanties pour les investisseurs internationaux, ce qui entraine inéluctablement une baisse de l'investissement qui est estimé comme étant trop risqué (du jour au lendemain, l'Etat peut tout confisquer) et donc une diminution de l'emploi et du flux d'entrée de devises.
Trop de confiance et de pouvoir déposés sur les membres du parti et amis de longue date sans aucun contrôle sur leurs agissements, ce qui a entrainé une corruption galopante et la destruction des moyens de production par manque d'investissements dus aux détournements massifs d'argent.
Mise en place d'un Super-Etat dont le fonctionnement bureaucratique est extrêmement lent et miné par les conflits internes et les guerres de pouvoirs entre les clans.

 

 L'Equation du Cercle Vicieux

 Les expropriations, lorsqu'elles ont du sens, peuvent être bénéfiques à la nation en temps de crise, notamment concernant des terres agricoles qui ne seraient pas exploitées (Cela a également été le cas au Venezuela, des communautés agraires ont été créées, mais faute de moyens, formation et outils, elles ne produisent rien ou presque). De même, les expropriations d'entreprises, tant que les propriétaires de ces dernières sont dument compensés (ce qui dans la plupart des cas n'est pas arrivé) peuvent aussi être compréhensibles lorsque cela répond à un besoin stratégique du pays.

Malheureusement, à l'image de la plupart des programmes menés par la Révolution Bolivarienne, les expropriations ont contribué à alourdir la gestion du pays et sont devenues un cauchemar pour le gouvernement qui n'a visiblement pas réussi à les gérer efficacement.

Un problème majeur subsiste encore de nos jours: La Révolution n'accepte pas ses erreurs et accuse systématiquement des "ennemis de la Patrie" comme étant responsables des maux qui nous touchent, cela ne leur permet pas d'effectuer une auto-critique pourtant nécessaire s'ils espèrent rectifier le cap. Les mouvements internes au Chavistes critiques du processus tels que "Marea Socialista" ont d'ailleurs été exclus du partit et écartés du pouvoir.

L'équation est pourtant simple:

Les entreprises ont besoin de Dollars pour produire car il leur faut des matières premières importées, des pièces de rechange importées, des machines importées.
L’État contrôle l'intégralité de l'attribution des dollars et ce depuis plus de 13 ans. L’État contrôle également le prix de certaines denrées, obligeant souvent les producteurs à vendre à perte.
Les entreprises produisent de moins en moins, faute de moyens, d'entretien et d'investissement (notamment à cause de la corruption et de  l'incompétence des personnes parachutées par le gouvernement).
La chute de production augmente les besoins d'importation de produits finis et de matières premières.
Plus on importe, moins il y a de dollars pour investir ou importer.
Moins on investit, plus l’appareil productif se détériore donc moins on produit donc plus on doit importer, moins on investit ...
Et le cercle vicieux continue (ou la boucle while() pour les initiés)

 

 Le Mal n'est pas Récent

La situation de pénurie actuelle est le résultat d'années de mauvaise gestion, ce serait irresponsable de remettre l’intégralité de la culpabilité sur le président actuel, Nicolas Maduro, qui n’a fait qu’hériter d’un système mis en place par Hugo Chavez. Dans ses débuts, la mécanique était supportable car le haut prix du baril et l’immense quantité de devises permettait à l’État de compenser le manque à produire par des importations.

Avec un baril à moins de 20 dollars, il n'y a de nos jours plus assez d'argent pour couvrir l'immensité des frais de ce super Etat, cela entraine une diminution des dotations aux programmes sociaux mais également une impossibilité de répondre à l'intégralité des besoins du secteur industriel privé comme public et ce en matière alimentaire mais également sanitaire.

Je ne suis pas économiste, mais il me suffit d'observer le monde et son histoire pour savoir qu'en fin de compte, ceux qui souffriront le plus (et qui souffrent déjà le plus des pénuries), ce seront les plus démunis.

Ces derniers commencent d'ailleurs déjà à voir au-delà du discours Nationaliste/Populiste qui s'érode au fil des pénuries, des scandales de corruption et de l’exposition de la vie faste que mènent les pontes du gouvernement. Cela s'est traduit en décembre dernier par unedéfaite cuisante du gouvernement aux élections législatives où l'opposition a remporté le scrutin avec plus de deux millions de votes d'écart.