La loi prévoit la base pour la réalisation d’une tenure foncière équitable entre les sexes. Des lois et des règles équitables créent un environnement propice dans lequel les femmes et les hommes sont plus susceptibles d'être en mesure d'exercer et de jouir de leurs droits à la terre de façon équitable.
Cependant, dans les pays postcoloniaux les progrès vers l’équité font souvent freinés par le pluralisme juridique. Le pluralisme juridique fait référence à une situation dans laquelle plusieurs types de régimes juridiques s’appliquent à un même territoire ; par exemple lorsque un régime statutaire coexiste avec d’autres régimes reconnus ou informels, tels que le droit religieux et le droit coutumier. Le pluralisme juridique soulève des défis mais offre également des opportunités. Il peut engendrer des conflits à l’intérieur d’un cadre juridique, notamment des droits qui se recoupent, la création d’autorités concurrentes ainsi que des règles contradictoires, qui ont souvent des incidences négatives sur l’équité foncière. Cependant, la reconnaissance de l’existence de règles, coutumes et pratiques peut être l’occasion créer un système juridique plus légitime qui soit plus susceptible d’encourager l’application du droit et de sécuriser les droits fonciers des hommes et des femmes.
À Madagascar, le pluralisme juridique restreint l'accès des femmes au foncier et les empêche bien souvent de faire entendre leur voix dans la gouvernance foncière. La base de données Genre et le Droit à la Terre (GLRD) indique dans son rapport sur le pays que si la loi statutaire foncière malgache reconnaît la propriété privée individuelle à travers la certification et de délivrance de titres, ceci n’est pas le cas de la majorité des règles coutumières foncières. Ce dualisme freine l’immatriculation des terres et la réforme foncière en générale. Les règles coutumières, qui prédominent et qui bénéficient de davantage de légitimité sociale sur le terrain, envisagent la terre comme un élément sacré, un patrimoine lié à l'ascendance des individus et des communautés sur lequel ceux-ci ne jouissent que de droits d’utilisation. Certains groupes ethniques considèrent taboue l'idée de la propriété individuelle car selon eux, la terre est la demeure des ancêtres, et n’appartient donc qu’à eux seuls (tanindrazana).
D'autre part, l’application limitée du droit statutaire peut être un obstacle à la réalisation d'une gouvernance foncière plus équitable entre les sexes, en particulier lorsque l'acquisition des terres est soumise à des règles coutumières qui excluent expressément les femmes. Bien que les règles coutumières influencent toujours fortement la propriété foncière, les données disponibles suggèrent néanmoins une évolution vers une reconnaissance de la propriété privée par certaines tribus. Il semblerait que la proportion de titres fonciers délivrés à des femmes progresse. Alors que le recensement agricole malgache de 2004-05 avait estimé à 15% la part des titres fonciers délivrés à des femmes, une étude plus récente par l’Observatoire du Foncier à Madagascar porte ce chiffre à 20% en 2011 grâce à l’introduction de la procédure certification en 2005.
Questions pour le forum:
Bien que la loi statutaire malgache soit globalement neutre et accorde les mêmes droits de propriété aux hommes et aux femmes, certaines, règles, coutumes et pratiques limitent l’accès des femmes au foncier. A l’inverse, la formalisation des droits fonciers peut avoir des conséquences négatives sur les femmes, leur retirant des droits qui auraient été reconnus sous un régime coutumier.
De quelle manière les décideurs politiques pourraient-ils favoriser l’articulation entre droit statutaire et droit coutumier afin de préserver et promouvoir les droits fonciers des femmes et d’éliminer la discrimination fondée sur le genre ? Plus précisément :
1. Comment les femmes malgaches influencent-elles – ou sont-elles en mesure d’influencer et de déterminer – les règles et pratiques coutumières relatives au foncier ?
- Pouvez-vous partager des initiatives qui œuvrent avec les institutions coutumières et religieuses pour impliquer toute la communauté (y compris les femmes) dans les processus de prise de décision en matière coutumière ?
- Pouvez-vous partager des exemples d’initiatives réussies qui ont soutenu l’intégration des femmes ou des groupes communautaires dans la redéfinition des règles et pratiques coutumières ?
- Quelles-sont les leçons à retenir de ces expériences ?
2. Dans quelle mesure la décentralisation de la gestion foncière, par la création de guichets fonciers et la reconnaissance de droits définis localement, permet-elle de sécuriser les droits fonciers des femmes ?
- La décentralisation améliore-t-elle la disponibilité de l’information et contribue-t-elle à l’autonomisation des femmes ?
- Quelles sont les limites de la certification comme seul moyen de sécurisation des droits fonciers des femmes ?
3. Existe-t-il d’autres mécanismes et processus qui permettraient aux malgaches de tirer meilleur avantage du pluralisme juridique ?
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