La guerre des terres à vendre | Land Portal

Date: 18 septembre 2016


Source: Ouest France


Par Hervé Bertho


La finance asservit la terre et ses paysans. C'est une guerre sournoise qui va de pair avec les crises économiques et le drame des réfugiés. La terre du monde est à vendre.


L'huile de palme, le maïs, le soja, le caoutchouc, le blé, le riz, la canne à sucre sont devenus l'objet de cultures industrielles à l'échelle mondiale pour lesquelles il faut conquérir de nouvelles terres. « C'est une nouvelle forme de colonisation », résume José Bové dans sa préface à l'ouvrage salutaire de Cécile Cazenave (1) qui fait le tour du monde de l'accaparement des terres.


La vaste Éthiopie concède ses terres immenses aux entreprises étrangères : onze millions d'hectares sont officiellement à louer. Le but avoué est de promouvoir une agriculture intensive pour exporter du riz comme de l'agrocarburant à base de canne à sucre.


L'ambition de devenir le premier exportateur africain se paye cher : les occupants de la brousse et de la savane sont condamnés ! Les bergers, les nomades, les villages traditionnels, les petits paysans sont sacrifiés.La déforestation de l'Indonésie se poursuit : 3,6 millions d'hectares vendus aux multinationales ! Ce poumon du monde est massacré sur l'autel de l'huile de palme. La biodiversité est en danger et nos artères occidentales se bouchent.


L'Ukraine, ancien grenier à blé de l'Europe, voit ses anciens kolkhozes passer aux mains des capitaux internationaux : 2,2 millions d'hectares échappent désormais aux Ukrainiens. Les lopins traditionnels des paysans sont cernés.


L'agrobusiness transforme aussi les paysages du Brésil où les fermes de plus de mille hectares écrasent les exploitations familiales de moins de dix hectares. La forêt amazonienne est rongée par la violence et l'on ne parvient même pas à tenir le compte des assassinats !


Les monarchies pétrolières ne connaissent pas la faim, sinon celle de la conquête des marchés de l'alimentation du monde. L'Arabie Saoudite envahit alors le Pakistan, le Soudan, le Kenya, l'Égypte en mettant la main sur leurs terres. Dubaï est devenue une plaque tournante du commerce des matières premières. Les Émirats organisent des foires commerciales dédiées à l'agroalimentaire.


Conséquence de tout cela : une dégradation écologique, des émeutes de la faim, une montée de la pauvreté, un exode rural, une expansion des bidonvilles, un dérèglement du monde qui n'a plus les pieds sur terre. Ce drame planétaire comme ses conséquences locales sont bien trop silencieux.


Nous, consommateurs, pouvons pourtant amener les décideurs politiques à prendre position. Modifions notre comportement pour ne pas être complice. Sans faire l'économie de notre indignation solidaire.


Car la terre doit rester le bien commun des hommes et les nourrir là où ils vivent.

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